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Projet de loi relatif à l’immigration et à l’intégration

(projet de loi N°2986)

Avril 2006

Conseil Lyonnais pour le Respect des Droits 11, rue Puits Gaillot 69001 Lyon Tél. 04 72 31 00 51 www.clrd.org

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INTRODUCTION

Présenté en Conseil des Ministres le 29 mars dernier par le Ministre de l’Intérieur, le projet de loi relatif à l’immigration et à l’intégration modifie une fois de plus la législation concernant l’entrée et le séjour des étrangers en France. Pour mieux répondre aux besoins (main d’œuvre) et aux intérêts (professions hautement

qualifiées…) de notre pays, le projet de loi renoue avec une politique d’ouverture des frontières à l’immigration de travail, mais restreint et précarise par ailleurs les possibilités de régularisation de celles et ceux qui ont vocation à s’installer en France pour des raisons personnelles ou familiales.

La présentation qui en a été faite devant la Commission des Lois laisse en outre apparaître des parallèles dangereux et inappropriés qui tendraient à relier la question de l’immigration à celles du chômage, des émeutes en banlieue etc… La référence à « l’immigration des années 1990 » opère également un amalgame entre une

immigration, familiale ou professionnelle, et la question du droit d’asile et de la protection d’hommes et de femmes en danger, qui ne sauraient par conséquent être limitée pour aucune raison que ce soit. Il s’agit dans ce dernier cas, d’adapter les moyens aux besoins, et non l’inverse.

« La France compte 2,4 millions de chômeurs et il manque à notre pays 500 000 logements sociaux. Le drame de l’immigration, telle qu’elle s’est déroulée à la fin des années 1990 et au début des années 2000 est que beaucoup de nouveaux arrivants se trouvent sans logement décent et sans emploi. Le taux de chômage des

personnes originaires de certaines nationalités atteint 30 à 40%. Les conséquences de cet état de fait peuvent conduire à de véritables tragédies, comme en attestent les incendies des 25 et 29 août 2005 à Paris (…). Il en résulte une « ghettoïsation » croissante d’une partie de la population immigrée,

qui est la première victime d’une telle situation, avec pour corollaire le risque d’une fragmentation croissante de la société française, qui conduit à la division, à la violence et au racisme. » (Audition de Monsieur Sarkozy par la Commission des Lois)

Le projet de loi, examiné par la Commission des Lois le 26 avril, sera présenté en première lecture à l’Assemblée Nationale à partir du 2 mai 2006. Comme il l’a déjà fait à plusieurs reprises, le Conseil Lyonnais pour le Respect des Droits (CLRD) veut attirer votre attention sur quelques points du projet.

Voici les points sur lesquels a porté notre réflexion : - mariage mixte, - regroupement familial, - vie privée et familiale, - éloignement, - droit d’asile.

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Mariage entre un(e) Français(e) et un(e) Etranger (ère)

Le projet de loi réaffirme clairement une volonté de lutter contre les mariages de complaisance, au risque d’entacher de suspicion tout mariage entre deux personnes de nationalités différentes :

« Les mariages mixtes expliquent l’essentiel de l’augmentation des flux migratoires réguliers en France : on comptait 50 720 mariages mixtes en 2004 contre 14 303 en 1997. Cette évolution reflète en partie l’ouverture internationale de la société française. Toutefois, de multiples témoignages de terrain émanant de préfets, d’élus

ou de responsables associatifs, font état d’une utilisation détournée du mariage » (audition de Monsieur Sarkozy par la Commission des Lois)

Rappelons en introduction du tableau comparatif, quelques-unes des règles qui président à la célébration du mariage : - âge minimum requis de 18 ans révolus (article 144 du Code civil), sauf dispense exceptionnelle.

- Le mariage est célébré dans la commune où l’un des deux époux a son domicile (article 165 CCiv) - Consentement des deux futurs époux (article 146 du Code civil) et présence des deux futurs époux le jour de la célébration (article 146-1 CCiv)

Le dépôt d’un dossier de mariage entre un(e) Français(e) et un(e) Etranger(ère) en situation irrégulière entraîne en général une demande d’enquête auprès du Procureur de la République de la part des mairies. Lorsque l’officier d’état civil a un doute quant au consentement d’un des futurs époux, il peut procéder à une audition séparée avant la saisine du Procureur, afin d’étayer son appréciation. Si le défaut de

consentement se vérifie à travers cet entretien, il a alors tout loisir de saisir le Procureur.

Le seul défaut de régularité du séjour ne saurait être un motif pour surseoir au mariage dès lors que toutes les conditions sont requises. La saisine du Procureur de la République entraîne une enquête, diligentée par les services de police, et a donc pour conséquence la prise d’une mesure d’éloignement à l’encontre de l’étranger en

situation irrégulière, et l’impossibilité du mariage.

Rappel : article 175-2 CC : Lorsqu’il existe des indices sérieux laissant présumer, le cas échéant au vu de l’audition prévue par l’article 63, que le mariage envisagé est susceptible d’être annulé au titre de l’article 146 ou de l’article 180, l’officier d’état civil peut saisir le procureur de la République. Il en informe les intéressés… »

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Proposition du CLRD L’article 10-3 de la Charte européenne des Droits de l’Homme dans la Ville dispose :

« Tout individu a le droit de s’associer sentimentalement avec la personne de son choix et de se marier sans qu’aucun obstacle, autre que ceux fixés par la loi, ne puisse s’y opposer. »

LE CLRD rappelle que l’article 146 du Code civil n’entraîne la nullité du mariage qu’en cas de vice du consentement. Le CLRD demande que ne soit pas considéré comme vice du consentement le fait d’être en situation irrégulière.

Tableau comparatif entre la loi en vigueur et le projet de loi

Situation actuelle Projet de loi

Mariage célébré en France + entrée régulière de l’étranger (= avec un visa même « touriste », même périmé) + communauté de vie = CARTE DE UN AN « VIE PRIVEE ET FAMILIALE »

PS : si le mariage a été célébré à

l’étranger, il faut qu’il soit au préalable transcrit sur le registre d’état civil français.

Mariage célébré en France + entrée avec un visa de LONG SEJOUR de l’étranger + communauté de vie = CARTE DE UN AN « VIE PRIVEE ET FAMILIALE »

PS : si le mariage a été célébré à

l’étranger, il faut qu’il soit au préalable transcrit sur le registre d’état civil français.

Deux ans de mariage + communauté de vie = DELIVRANCE DE PLEIN DROIT DE LA CARTE DE DIX ANS

Trois ans de mariage + communauté de vie = POSSIBILITE DE DELIVRANCE DE LA CARTE DE DIX ANS (appréciation du Préfet) Possibilité de retirer cette carte dans les quatre premières années du mariage en cas de rupture de la vie commune.

Deux ans de mariage + communauté de vie = POSSIBILITE DE DEMANDER LA NATIONALITE FRANÇAISE (acquisition par déclaration)

Quatre ans de mariage + communauté de vie = POSSIBILITE DE DEMANDER LA NATIONALITE FRANÇAISE

Le projet de loi relatif à l’immigration et à l’intégration multiplie les obstacles à l’obtention d’un titre de séjour pour les catégories d’étrangers dont le motif du séjour en France relève de la vie privée. Les couples binationaux entrent dans cette catégorie.

La loi en vigueur exige lorsque le mariage est célébré à l’étranger d’abord la transcription de cet acte de mariage - entre 7 et 9 mois- puis la délivrance d’un visa de long séjour- délai de plusieurs mois. Aujourd’hui un couple franco étranger est séparé de fait pendant au moins un an.

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Le délai actuel d’obtention d’un visa pour les conjoints de Français(e) qui ne justifiaient pas d’une entrée régulière, et devaient donc repartir pour obtenir un visa « conjoint de Français » varie selon les pays d’origine et selon la situation antérieure des personnes :

- un ressortissant du Maghreb n’étant jamais venu en France auparavant, ayant obtenu la transcription du mariage peut obtenir le visa en un à deux mois, - le même ressortissant ayant eu par le passé un refus de séjour en France pourra attendre son visa une année.

Ces exemples, issus de l’expérience de terrain des associations de défense du droit des étrangers, montrent, si besoin était, le risque d’arbitraire auquel seront automatiquement soumis les conjoints de Français.

L’exigence du visa de long séjour introduite par le projet de loi entraînera l’obligation pour tous les étrangers conjoints de français de repartir solliciter ce visa.

Enfin, la loi actuelle prévoit un droit automatique à une carte de séjour de dix ans après deux années de mariage. Le délai est porté à trois années par le projet de loi, et l’automaticité est supprimée et remplacée par un pouvoir discrétionnaire du préfet.

Le projet prône à plusieurs reprises une meilleure intégration des étrangers en France tout en fragilisant leur situation administrative (multiplication des récépissés de 3 mois, difficultés d’accès au logement, au travail, droits sociaux…) sur une période plus longue.

De plus l’accès à la carte de dix ans après trois années ne serait plus un plein droit mais serait laissé au pouvoir discrétionnaire du préfet aggravant d’autant la situation administrative des étrangers.

Le législateur pourrait envisager l’accès de plein droit à une carte de dix ans dans la mesure où l’étranger conjoint de français devient parent d’enfant français.

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Le regroupement familial

Le regroupement familial (RF) concerne la famille (conjoint(e) et enfants mineurs) d’un étranger régulièrement installé en France, qui souhaite que sa famille puisse s’établir avec lui. Jusqu’à la réforme de novembre 2003, la loi prévoyait que les membres de famille rejoignant obtiennent le même titre de séjour que l’étranger

rejoint (exemple : Monsieur M. vit et travaille en France depuis de nombreuses années, il est titulaire d’une carte de résident de 10 ans, son épouse qui le rejoint obtient la même carte à son arrivée).

La réforme de 2003 a introduit, comme pour les conjoints de Français (es) une période probatoire durant laquelle l’étranger est mis en possession d’un titre de séjour temporaire d’un an.

Situation actuelle Projet de loi

Le RF peut être demandé après un an de séjour régulier en France de l’étranger rejoint, à 2 conditions :

1. l’étranger rejoint doit justifier de ressources au moins égales au SMIC

2. il doit justifier d’un logement répondant à des normes de surface en fonction de la taille de la famille

Le regroupement familial peut être refusé si l’étranger se trouve déjà sur le territoire français.

En cas de rupture de la vie commune, la carte peut être retirée ou ne pas être renouvelée dans les deux ans qui suivent le RF.

Le RF peut être demandé après 18 mois de séjour régulier en France de l’étranger rejoint, à 3 conditions :

1. l’étranger rejoint doit justifier de ressources au moins égales au SMIC

2. il doit justifier d’un logement répondant à des normes de surface en fonction de la taille de la famille

3. il doit justifier se conformer « aux principes qui régissent la République française ».

Le regroupement familial peut être refusé si l’étranger se trouve déjà sur le territoire français.

En cas de rupture de la vie commune, la carte peut être retirée ou ne pas être renouvelée dans les trois ans qui suivent le RF.

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L’accès au regroupement familial est retardé par ce projet de loi, et durci par l’ajout d’une condition supplémentaire dont on ne connaît pas encore les conditions d’évaluation.

Nous pouvons cependant mettre cette condition en perspective avec les conditions existantes pour l’obtention de la nationalité française :

Deux notions sont fondamentales pour l’acquérir :

- la connaissance et l’usage de la langue française - l’insertion dans la communauté française

Nous pouvons imaginer que se conformer aux principes de la République nécessite une bonne connaissance de notre langue, et une « insertion dans la communauté ». Ces éléments vaudront en tout état de cause pour l’obtention de la carte de résident.

«1. La notion « d’assimilation linguistique » est celle que l’on trouve dans les formulaires donnés aux agents de préfecture du bureau des étrangers « section naturalisation ».

En langage administratif il s’agit d’un PVA « procès verbal d’assimilation » Il est précisé dans le formulaire : « La notion d’assimilation linguistique » renvoie à la nécessaire maîtrise par le candidat de compétences de base en compréhension/expression en français oral

afin que celui-ci puisse faire face, en autonomie, aux situations simples de communication de la vie courante (relations avec les commerçants, médecins, enseignants). L’assimilation linguistique doit donc être appréciée au regard de la capacité du

requérant à communiquer en français pour accomplir seul les démarches de la vie courante (transport, banque, poste, mairie…). A cet égard le degré d’exigence doit être adapté à la situation particulière de chaque demandeur et tenir compte de ses qualifications intellectuelles et de sa condition

sociale. C’est pourquoi la maîtrise du français écrit ne sera pas considérée comme un élément déterminant de l’assimilation linguistique du candidat surtout si celui-ci ne lit ni n’écrit dans sa langue maternelle. »

2. insertion dans la communauté française (chapitre 3 du PVA). « - Vit-il (elle) dans un milieu en majorité français ou étranger (famille, voisinage, travail et loisirs) ? - Participe-t-il (elle) à la vie locale (sociale, associative, culturelle, sportive, etc) ? Y a t-il (elle) des responsabilités ? si oui lesquelles ? - Le français est-il utilisé dans le cadre de ses activités ? - Observations complémentaires sur l’insertion dans la communauté française :

plusieurs lignes laissées à l’appréciation de l’agent (…) - usage de la langue française

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- langues utilisées dans le milieu professionnel - en famille : avec son conjoint, avec les enfants - Ecoles fréquentées par les enfants - L’intéressé peut-il être considéré comme suffisamment assimilé pour accomplir seul

les démarches de la vie courante ? - Si non, l’intéressé est il susceptible de progresser dans un délai rapproché ? si non pourquoi ? »

Toutes ces mesures qui s’ajoutent les unes aux autres génèrent un manque de sécurité dans les familles qui ne nous apparaît pas propice à l’intégration recherchée.

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Vie privée et familiale : Du plein droit au précaire

Les onze catégories d’étrangers pouvant bénéficier d’une carte de séjour de plein droit dans le cadre du respect de la vie privée et familiale sont largement restreintes par le projet de loi. Cet article inscrit dans la loi depuis 1998 avait comme objectif la régularisation au cas par cas des étrangers en situation irrégulière sur le territoire :

c’est tout cet édifice que l’on tente de faire disparaître.

Mentionnons deux points particuliers du projet :

- la suppression de la régularisation de plein droit d’un étranger résident sans papier habituellement en France ; - la multiplication des conditions à remplir dans le cadre général du plein droit à une carte de séjour pour l’étranger bénéficiant du droit au respect de sa vie

privée et familiale

De la même manière que l’on précarise l’accès de la carte d’un an à la vie privée et familiale on projette pratiquement de supprimer l’accès de plein droit à la carte de dix ans. Le « on peut » devient la règle générale, alors que le principe devrait être « on doit ».

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Dispositions relatives à l’accueil des demandeurs d’asile

Nous attirons l’attention du législateur sur l’article 65 relatif à l’accueil des demandeurs d’asile qui propose de modifier l’article L. 348-3 II du code de l’action sociale et des familles.

La disposition relative à l’obligation faite aux personnes morales chargées de la gestion des centres d’accueil de signaler en permanence à l’autorité policière les données individuelles concernant les réfugiés accueillis apparaît contraire à la confidentialité nécessaire à ce type de dossier.

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De « l’invitation » à «l’obligation » de quitter le territoire en cas de refus de séjour

Le CLRD alerte sur la procédure mise en place par la combinaison des articles 36 II alinéa 3 et de l’article 41 du projet de loi.

En effet, le nouvel article 512-1 prévoit que l’étranger qui s’est vu notifier l’obligation de quitter le territoire français dans un délai d’un mois (article 36 II alinéa 3) pourra dans un délai de quinze jours à compter de cette notification en demander l’annulation au tribunal administratif qui se prononcera à la fois sur le fond et la forme de la décision attaquée dans un délai maximum de 3 mois.

Ce recours suspend l’exécution de l’obligation de quitter le territoire sans pour autant faire obstacle au placement en rétention administrative.

Or, en cas de placement en rétention administrative avant que le tribunal n’est rendu sa décision, le tribunal administratif devra statuer selon la procédure prévue à l’article 512-2, c'est-à-dire à juge unique, sur la légalité de l’obligation de quitter le territoire français et sur la décision fixant le pays de renvoi, au plus tard 72h après son

placement.

Cela signifie que le jugement ne porte plus sur le fond et la forme de la décision mais seulement sur la légalité de l’éloignement. Autrement dit, l’étranger qui aura bénéficié des 3 mois de sursis sera jugé sur le fond et sur la forme alors que celui qui aura eu la malchance de se faire contrôler par les forces de l’ordre sera jugé uniquement sur

la forme.

Cette rupture d’égalité de traitement est contraire à l’esprit de nos institutions.