Cour de Cassation
Chambres r�unies
Audience publique du 2 d�cembre 1941 |
Cassation |
Publi� au bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
CASSATION, sur le pourvoi des consorts Connot, d'un
arr�t rendu, le 25 f�vrier 1937, par la cour d'appel de Besan�on, au profit du
docteur Franck.
ARRET du 2 d�cembre 1941.
La
Cour,
Statuant
toutes chambres r�unies ;
Ou�,
� l'audience publique du 1er d�cembre 1941, M. le pr�sident Lagarde en son
rapport, Ma�tres Masson et Coutard, avocats des
parties, en leurs observations respectives, M. le procureur g�n�ral Caous en ses conclusions :
Et
apr�s en avoir d�lib�r� en la chambre du conseil en l'audience de ce jour ;
Sur le moyen unique pris en sa premi�re branche :
Attendu
qu'il r�sulte des �nonciations de l'arr�t attaqu� que, dans la nuit du 24 au 25
d�cembre 1929, une voiture automobile, appartenant au docteur Franck, et que
celui-ci avait confi�e � son fils Claude, alors mineur, a �t� soustraite
frauduleusement par un individu demeur� inconnu, dans une rue de Nancy o�
Claude Franck l'avait laiss�e en stationnement ;
Qu'au
cours de la m�me nuit, cette voiture, sous la conduite du voleur, a, dans les
environs de Nancy, renvers� et bless� mortellement le facteur Connot ;
Que
les consorts Connot, se fondant sur les dispositions
de l'article 1384, alin�a 1er, du Code civil, ont demand� au docteur Franck
r�paration du pr�judice r�sultant pour eux de la mort de Connot
;
Attendu que, pour rejeter la demande des consorts Connot,
l'arr�t d�clare qu'au moment o� l'accident s'est produit, Franck, d�poss�d� de
sa voiture par l'effet du vol, se trouvait dans l'impossibilit� d'exercer sur
ladite voiture aucune surveillance ;
Qu'en
l'�tat de cette constatation, de laquelle il r�sulte que Franck, priv� de
l'usage, de la direction et du contr�le de sa voiture, n'en avait plus la garde
et n'�tait plus d�s lors soumis � la pr�somption de responsabilit� �dict�e par
l'article 1384, alin�a 1er, du Code civil, la cour d'appel, en statuant ainsi
qu'elle l'a fait, n'a point viol� le texte pr�cit� ;
Sur le point pris en sa seconde branche :
Attendu
que, dans leurs conclusions en cause d'appel, les consorts Connot
soutenaient que Franck, en abandonnant sa voiture automobile sur la voie
publique sans prendre aucune pr�caution en vue d'�viter un vol, avait commis
une faute, au sens de l'article 1382 du Code civil, faute qui avait eu pour
cons�quence directe le dommage dont les demandeurs poursuivaient la r�paration
;
Que,
pour rejeter ces conclusions, l'arr�t d�clare qu'il n'y a lieu de rechercher si
Franck a commis la faute qui lui est imput�e, aucun lien de cause � effet ne
pouvant exister entre la faute pr�tendue et l'accident dont Connot
a �t� victime ;
Que
le pourvoi fait grief � l'arr�t d'avoir, en statuant ainsi, viol� l'article
1382 du Code civil ;
Mais attendu que ce grief n'a pas �t� examin� par la chambre civile �
l'occasion du pourvoi form� contre l'arr�t rendu, le 10 juillet 1931, par la
cour d'appel de Nancy, que l'arr�t de la chambre civile du 3 mars 1936, qui a
cass� l'arr�t pr�cit� de la cour de Nancy, est fond� exclusivement sur la
violation de l'article 1384, alin�a 1er, du Code civil ;
Attendu,
d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 1er avril 1837, les
chambres r�unies de la Cour de cassation n'ont comp�tence pour statuer que
lorsque le deuxi�me arr�t ou jugement rendu dans la m�me affaire, entre les
m�mes parties proc�dant en la m�me qualit�, est attaqu� par les m�mes moyens
que le premier ;
Qu'il
�chet, en cons�quence, de renvoyer � la chambre
civile la connaissance de la seconde branche du moyen ;
Par ces motifs :
D�clare
le moyen mal fond� dans sa premi�re branche et, pour �tre statu� sur la seconde
branche dudit moyen, renvoie la cause et les parties devant la chambre civile.
Publication : Bulletin des arr�ts Cour de Cassation Chambre civile N. 292 p. 523
�Dalloz, les grands arr�ts de la jurisprudence civile, observations Henri CAPITANT, Alex WEILL, Fran�ois TERRE, p. 493
D�cision attaqu�e : Cour d'Appel de Besan�on 1937-02-25
Titrages et r�sum�s
1)
RESPONSABILITE CIVILE - Chose inanim�e - Pr�somption - - Article 1384, alin�a
1er, du Code civil - Exon�ration - Automobile - Vol.
Le propri�taire d'une voiture automobile, priv� de l'usage, de la direction ou
du contr�le de son v�hicule par l'effet d'un vol se trouve dans l'impossibilit�
d'exercer sur ce v�hicule aucune surveillance ; il n'en a plus la garde et
n'est plus d�s lors soumis � la pr�somption de responsabilit� �dict�e par
l'article 1384, alin�a 1er, du Code civil.
2) Cassation - Pourvoi en mati�re civile ordinaire - Chambres r�unies -
Comp�tence - Conflit entre la chambre civile et la juridiction de renvoi -
N�cessit� - Moyen non examin� par la chambre civile - Renvoi � ladite chambre.
Aux termes de l'article 1er de la loi du 1er avril 1837, les chambres r�unies
de la cour de cassation n'ont comp�tence pour statuer que lorsque le deuxi�me
arr�t ou jugement rendu dans la m�me affaire, entre
les m�mes parties, proc�dant en la m�me qualit�, est attaqu� par les m�mes
moyens que le premier.
Il
s'en suit en particulier que, si elles doivent statuer sur un moyen de
cassation d�j� examin� par la chambre civile � l'occasion d'un pr�c�dent
pourvoi ayant abouti � un arr�t de cassation (en l'esp�ce sur l'art. 1384,
alin�a 1er, du Code civil), elles ne peuvent que renvoyer � l'examen de ladite
chambre la partie de ce moyen (visant en l'esp�ce l'art. 1382 du Code civil)
sur laquelle elle ne s'est pas prononc�e lors du premier pourvoi.
Codes cit�s : Code civil 1384 al. 1. Code civil 1382
Lois cit�es : Loi 1837-04-01 art. 1